Dernière mise à jour : le 29 décembre 2015

La République en France (1880-1945)
Cours écrits et réalisés par Maxime Forriez (2015)

    Repères chronologiques des Républiques[7].

  • IIIe République (1870-1940)

  • État français (1940-1944)

  • IVe République (1944-1958)

    La IIIe République est née le 4 septembre 1870 à la suite de la défaite contre la Prusse de Napoléon III.

    Dans les années 1880, les royalistes perdent la majorité à l’Assemblée nationale. À partir de ce moment-là, on parle d’enracinement de la République.

  1. La IIIe République de 1880 à 1914

  2.     La « Constitution »[4] est votée sous forme de lois constitutionnelles en 1875.

        Le régime est parlementaire[8].

        Le pouvoir[15] s’organise autour de deux organes.

    • L’organe législatif est le Parlement composé de deux assemblées : l’Assemblée nationale et le Sénat. Les députés sont élus au suffrage universel[14] direct par l’ensemble des citoyens[3] français. Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect par l’ensemble des grands électeurs.

    • L’organe exécutif est le Gouvernement dont le chef est le président du Conseil (ancien nom du Premier ministre). Le président de la République est le chef du pouvoir exécutif. Il est nommé par l’Assemblée nationale et le Sénat.

        Sous les IIIe et IVe Républiques, le Parlement domine le Gouvernement.

    1. Les libertés fondamentales

    2.     Les libertés fondamentales[6] sont votées :

      • la liberté d’expression : la liberté de la presse en 1881.

      • la liberté syndicale en 1884.

      • la liberté scolaire en 1881-1882.

        • L’école est gratuite en 1881.

        • L’école est obligatoire et laïque en 1882.

      • la liberté d’association en 1901.

        • Exemple. Partis politiques.

          Seuls les hommes sont des citoyens à part entière. Les femmes et les enfants sont considérés comme étant des mineurs.

    3. La laïcité

    4.     Les premières mesures de la laïcité[5] sont prises avec les lois scolaires de Jules Ferry en 1881-1882.

          En 1884, les prières publiques sont interdites au sein des Assemblées.

          En 1905-1906, sont votées les lois sur la laïcité. Désormais, l’État et les trois Églises françaises d’alors (catholiques, protestantes et judaïques) se séparent. La laïcité de l’État signifie que la France est neutre dans tout débat religieux. Les Églises ne peuvent plus intervenir au sein des institutions de l’État.

    5. La vie politique

    6.     Progressivement, entre 1870 et 1914, les royalistes disparaissent au profit des républicains.

          Les républicains suivent deux grandes tendances :

      • les républicains modérés, comme Jules Ferry, au pouvoir entre 1881 et 1902 ;

      • les républicains radicaux, Georges Clemenceau, au pouvoir entre 1902 et 1919.

          Entre 1870 et 1914, les socialistes, comme Jean Jaurès, apparaissent au sein de l’Assemblée nationale. À partir des années 1890, ils commencent à prendre l’importance au sein de celle-ci.

    7. L’importance de l’école

    8.     L’école primaire est la seule école obligatoire.

          L’école primaire est au cœur de la formation des citoyens au système républicain. Elle transmet par les instituteurs les valeurs de la République sur l’ensemble du territoire. L’école participe à la mise en valeur de l’unité nationale. Seule la langue française est enseignée à l’école. Les langues régionales, comme le breton ou le corse, sont interdites.

          Les instituteurs remplacent progressivement les prêtres, en général des monarchistes, dans l’enseignement primaire public. Cependant, ils peuvent continuer à enseigner au sein des écoles privées. À l’école publique, l’instruction religieuse est remplacée par l’instruction civique.

          L’école publique étant laïque, elle est un espace neutre au sein duquel l’enseignement à une confession religieuse n’a pas sa place.

          L’école publique met en place une promotion scolaire basée sur le mérite individuel. Les élèves les plus méritants peuvent faire des études au collège.

    9. L’unité nationale

    10.     L’unité nationale est la plus grande construction de la IIIe République. Elle repose sur trois notions :

      • la souveraineté nationale ;

      • la cohésion nationale ;

      • l’assimilation.

          La souveraineté nationale est défendue par le suffrage universel (direct ou indirect).

          La cohésion nationale est le cœur du patriotisme[12] républicain. Il s’agit d’une part de convaincre les citoyens de leur appartenance à la nation[9] française. D’autre part, il faut permettre la diffusion du sentiment national. Trois moyens sont principalement utilisés : l’école publique, le service militaire obligatoire et l’aménagement du territoire (voies de communication). Ces trois moyens véhiculent l’idée de revanche sur l’Allemagne qui avait annexé en 1870 les deux départements d’Alsace et la Moselle.

          L’assimilation concerne les peuples colonisés par la IIIe République. Cependant, la réalité est tout autre. Loin d’être assimilés, les peuples demeurent dans une position d’infériorité.

          Pour permettre la diffusion de la République, la République se dote de représentations et de rites. Les représentations sont nombreuses : Marianne, la fête national du 14 juillet, l’hymne national La Marseillaise, la devise républicaine « Liberté, égalité, fraternité » et le drapeau tricolore. Elles figurent sur tous les bâtiments publics et sur tous les actes officiels de la République. Les rites sont au cœur de l’école. Par exemple, les enfants apprennent La Marseillaise par cœur à l’école publique. Tous les ans à partir de 1880, le 14 juillet devient le jour d’une importance cérémonie républicaine via un défilé militaire.

          L’unité nationale est vérifiée en 1914 lors du début de la Première Guerre mondiale. Une « union sacrée » est prononcée dès l’été 1914.

    11. La vie sociale sous la IIIe République

    12.     La vie sociale avant la Première Guerre mondiale de la IIIe République est très mouvementée et riche en événement.

          Le premier conflit concerne la laïcité. Les conflits entre cléricaux et anticléricaux sont violents. La loi de 1905 est loin de les avoir apaisés. Il faudra attendre la guerre de 1914-1918 pour y mettre un terme.

          Le second conflit concerne la condition ouvrière. La France de la IIIe République est largement paysanne. La République favorise par conséquent les milieux paysans et les classes moyennes des villes, délaissant les ouvriers, peu nombreux alors. Les ouvriers sont dans une condition extrêmement précaire face à la bourgeoisie capitaliste. Ils se sentent exploités par elle. Les grèves, autorisées depuis 1864, restent malgré tout sévèrement réprimées. L’autorisation des syndicats, comme la Confédération générale du travail (C.G.T.), permet d’améliorer progressivement la condition ouvrière. Le travail des enfants de moins de 13 ans est interdit à partir de 1874. Le repos hebdomadaire est acquis à partir de 1906. Les retraites ouvrières sont créées à partir de 1910. La durée légale du travail est abaissée progressivement à 10 heures par jour en 1900, puis à 8 heures par jours en 1919. Cela permet aux ouvriers d’accès progressivement accès aux loisirs.

          Le troisième conflit concerne la condition des femmes. Il est important de noter la place des femmes dans la société. Les filles vont à l’école. Les femmes travaillent de plus en plus, notamment dans les secteurs de la santé, dans les bureaux et dans les usines. Le divorce est rétabli par une loi en 1884. Les salaires des femmes correspondent à la moitié du salaire des hommes. Les mouvements féministes revendiquent principalement le droit de vote. Les femmes bénéficient de la liberté des associations pour réclamer l’égalité civile, l’égalité civique et l’égalité des salaires.

    13. Les crises républicaines

    14.     Les crises sous la IIIe République sont nombreuses. Elles sont provoquées soit par la montée de l’antiparlementarisme, soit par différents scandales politico-financiers[13] de toute sorte.

          L’antiparlementarisme[2] est un mouvement d’idée dont les représentants sont contre le Parlement. Ils défendent l’idée d’un pouvoir fort. Entre 1886 et 1889, les mécontents, dus à la crise économique, se rassemblent autour du général Boulanger, partisan d’un pouvoir fort de l’exécutif.

          L’affaire Dreyfus (1894-1906) est une affaire d’espionnage dans laquelle le capitaine, de confession juive, Dreyfus est accusé d’avoir communiqué des renseignements à l’Allemagne. Il est accusé de haute trahison par un tribunal militaire. Il est dégradé et condamné à la prison à vie à l’île du Diable à Cayenne. Malgré les preuves évidentes de l’innocence de Dreyfus, le Parlement, l’armée et l’Église refusent de réviser le procès. Le pays est alors divisé en dreyfusards et en antidreyfusards. En 1898, l’antidreyfusard Émile Zola finit par obtenir la libération de Dreyfus. Finalement, Dreyfus est réhabilité en 1906 qui devient le symbole des droits de l’homme et renforce le modèle républicain.

  3. La République dans la tourmente de 1914 à 1918

  4.     Pendant l’été 1914, deux courants s’affrontent : les pacifistes et les nationalistes[10]. Les pacifistes sont représentés par Jean Jaurès qui souhaite que les ouvriers s’unissent de manière internationale afin d’empêcher la guerre. Par opposition, les nationalistes attendent la revanche sur l’Allemagne.

        Le 31 juillet 1914, l’assassinat de Jean Jaurès met fin aux rêves des pacifistes.

        Le président de la République, Raymond Poincaré, appelle à l’union sacrée afin de défendre la patrie[11]. Pacifistes et nationalistes finissent par s’unir dans ce but.

        En 1917, la cohésion nationale est mise à mal par la longueur de la guerre. Des mutineries éclatent dans l’armée. Des grèves ont lieu. Le mouvement pacifiste renaît. En septembre 1917, les socialistes quittent l’union sacrée. Georges Clemenceau réprime toute manifestation antinationale.

        En 1918, la fin de la guerre montre que la cohésion nationale a tenu. Le régime républicain est sorti renforcer par la guerre.

  5. La République de l’après Première Guerre mondiale de 1918 à 1940

  6.     Après une phase de prospérité, la crise des années 1930 ébranle la République.

    1. De la prospérité à la crise

    2.     Entre 1918 et 1931, la reconstruction de la France permet d’ouvrir une période de prospérité économique.

          Entre 1931 et 1940, la France connaît la crise des années 1930. Les productions agricoles et industrielles reculent. Les pouvoirs publics ont du mal à faire face. Les salaires diminuent. Le chômage augmente. Les travailleurs étrangers sont expulsés.

    3. La vie politique en crise

    4.     En 1934, l’affaire Stavisky permet une nouvelle montée de l’antiparlementarisme, de l’antisémitisme[1] et la xénophobie. Les parlementaires sont notamment accusés d’incompétence et de corruption. Stavisky était un escroc trouvé mort. Il était proche du parti radical. Il devient le symbole de cette corruption, provoquant le 6 février 1934, une émeute à Paris dirigée par l’extrême droite.

          En 1936, le Front populaire remporte les élections de l’Assemblée nationale. Pour la première fois, la gauche obtient la majorité à l’Assemblée nationale. Il met en place une série de mesures sociales, comme le droit aux congés payés, qui essayent de résoudre la crise.

          En 1938, le Front populaire disparaît.

    5. Les valeurs de la République en crise

    6.     Les valeurs républicaines ont été mises à mal au début des années 1920 avec l’apparition de nouveaux régimes comme le fascisme en Italie ou le communisme en U.R.S.S. En effet, beaucoup de Français ont des sympathies pour ses régimes. En 1920, le parti communiste français, défendant le modèle de l’U.R.S.S., se sépare du parti socialiste au Congrès de Tours.

          La guerre a fortement ébranlé les valeurs françaises du travail et de l’épargne. Elle a également mis à mal la réussite par le mérite défendue par la République.

          Les Français, traumatisés par la Première Guerre mondiale, sont devenus profondément pacifistes. Cela est une position intenable par rapport aux différentes agressions d’Hitler, menant progressivement à un nouveau conflit entre la France et l’Allemagne. La France ne fait pas face à cette réalité. Lors de la conférence de Munich en septembre 1938, les Français et les Britanniques cèdent au nom des idées pacifistes, à Hitler une partie de la Tchécoslovaquie, pourtant alliée de la France. À la suite de cette affaire, l’opinion se divise entre les antimunichois, minoritaires, et les munichois, partisans de maintenir la paix à tout prix.

          En 1939, la France est affaiblie et divisée ; elle n’est pas prête à faire face à un nouveau conflit.

  7. La parenthèse de l’État français de 1940 à 1944

  8.     Le 28 mai 1940, l’armée française est vaincue par la guerre éclair menée par Hitler à Dunkerque. La France est mise en déroute en moins de six semaines.

        Le 22 juin 1940, l’armistice est signé.

        Le 10 juillet 1940, le maréchal Pétain obtient des députés et des sénateurs les pleins pouvoirs.

        Le 11 juillet 1940, la IIIe République disparaît au profit de l’État français. Le modèle républicain disparaît. De nouveaux symboles apparaissent comme la devise « Travail, Famille, Patrie ».

    1. La politique de la collaboration

    2.     Le régime de Pétain s’installe à Vichy.

          La politique de l’État français est une politique d’exclusion des « mauvais Français » : les républicains, les socialistes, les communistes et les juifs.

          Dès 1941, l’État français participe à la déportation des Juifs français.

          L’État français mise sur la victoire de l’Allemagne nazie. Il mène une politique de collaboration sur tous les plans.

    3. La Résistance

    4.     Le 18 juin 1940, l’appel du général de Gaulle à Londres est le premier acte de résistance.

          Dès l’armistice signé, de nombreux français, de manière isolée, manifestent des actes de résistance au régime de Vichy et à l’envahisseur allemand. Progressivement, Jean Moulin, commandée par le général de Gaulle, organise les mouvements de résistance autour des Forces françaises libres (F.F.L.).

          En 1941, l’attaque de l’U.R.S.S. par Hitler provoque l’entrée dans la Résistance des communistes.

          La guerre tourne en 1942. L’Allemagne risque de perdre, car l’attaque de l’U.R.S.S. n’a pas le succès attendu par Hitler. Les opérations s’embourbent.

          Créé par Jean Moulin en 1943, le Conseil national de la Résistance (C.N.R.) manifeste sa volonté de rétablir la République dès la fin de la guerre. Il élabore un programme politique économique et social de l’après-guerre.

          Les résistants risquent torture, exécution ou déportation dans les camps.

  9. La nouvelle République : la naissance de la IVe République de 1944 à 1945

  10.     Entre juin 1944 et mai 1945, la France est libérée. Le général de Gaulle prend la tête d’un nouveau gouvernement provisoire formé de résistants. Pétain est jugé dans un procès, bâclé, en juillet-août 1945. Il est condamné à mort pour haute trahison, mais il a été gracié et meurt en prison en 1951. Laval a également eu son procès en octobre 1945. Il est fusillé juste après.

        Contre l’avis du général de Gaulle, le régime parlementaire est rétabli. Cependant, de nouvelles valeurs sont désormais acquises. Par exemple, les femmes deviennent des citoyennes à part entière. Elles acquièrent le droit de vote en 1946. Par ailleurs, le droit de grève devient une valeur constitutionnelle en 1946.





[1] Antisémitisme : mouvement politique regroupant les individus n’aimant pas les Juifs et prônant leur exclusion de la société sous forme de discriminations diverses.

[2] Antiparlementarisme : mouvement politique condamnant le régime parlementaire, dénonçant le coût du régime parlementaire, et prônant un pouvoir fort au sein duquel les marges de manœuvre du Parlement seraient très limitées. Certains mouvements antiparlementaires désirent la suppression pure et simple de l’institution parlementaire. La IIIe République a connu plusieurs crises antiparlementaires : la crise du boulangisme, la crise de février 1934, etc.

[3] Citoyen : personne physique ayant la capacité de participer à la vie politique d’un État (droit de vote, droit d’être éligible, etc.).

[4] Constitution : ensemble de textes juridiques créant et organisant les institutions politiques d’un État de droit, ainsi que les droits et obligations d’un citoyen.

[5] Laïcité : système qui enlève aux Églises tout rôle dans l’État, l’enseignement, ou toute autre institution publique.

[6] Libertés fondamentales : libertés individuelles défendues par la Constitution. Elles regroupent les libertés politiques, les libertés de penser, les libertés d’association, etc.

[7] République : nom du système démocratique français.

[8] Régime parlementaire : système politique au sein duquel le partage entre les pouvoirs est fondé sur un équilibre institutionnel entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Le pouvoir législatif peut renverser le pouvoir exécutif ; le pouvoir exécutif peut renverser le pouvoir législatif. Il s’oppose au régime présidentiel, notamment appliqué aux États-Unis. Toutes les Républiques françaises sont des régimes parlementaires depuis la IIe République jusqu’à la Ve République.

[9] Nation : construction territoriale dans laquelle une communauté partage la même culture et la même volonté de vivre ensemble.

[10] Nationalisme : mouvement politique plaçant la nation comme la valeur suprême aboutissant à l’exclusion de l’étranger, voire à sa soumission ou sa destruction.

[11] Patrie : pays auquel un individu se sent appartenir. La patrie peut être un État, mais aussi tout autre territoire.

[12] Patriotisme : mouvement politique visant à faire aimer sa patrie de manière excessive.

[13] Scandale politico-financier : malhonnêteté commise par un homme politique qui fait obtenir des commandes de l’État (ou des collectivités locales) à un entrepreneur en échange d’importantes sommes d’argent, soit pour financer ses campagnes électorales, soit pour un enrichissement personnel. Détournement de fonds publics vers un usage personnel.

[14] Suffrage universel : système dans lequel votent tous les citoyens.

[15] Théorie de la séparation des pouvoirs : interprétation juridique de la théorie de Montesquieu prônant la division du pouvoir entre trois éléments.

  • Pouvoir législatif : pouvoir de faire des lois.

  • Pouvoir exécutif : pouvoir de faire appliquer les lois.

  • Pouvoir judiciaire : pouvoir d’interpréter les lois et de sanctionner ceux qui désobéissent à celles-ci. En France, le pouvoir judiciaire n’existe pas. Ce n’est qu’une autorité indépendante depuis la Révolution française.