Les origines de la légende du droit de cuissage...
Date de publication : 31/12/2021
N’aimant pas trop le réveillon du 31, j’ai le temps de vous écrire ce petit post. Qu’en dire ? Tout est dans le titre. Le droit de cuissage est une légende qui naquit au XVIIIe siècle. Vous savez désormais que c’est à ce moment-là que fut également inventé le terme « féodalité » (cf. post sur le sujet).
Je sais que je casse un mythe pour vous, messieurs. On a tous regardé un film pornographique montrant un seigneur tirant à la chaîne des jeunes femmes vierges afin qu’elles pussent se marier. Si le fantasme érotique fait toujours son petit effet, il ne correspond à aucune réalité historique. De temps à autre, il faut être sérieux. Le droit de cuissage, même dans sa version soft, à savoir vérifier si l’hymen de la jeune femme était percé, est impossible à mettre en œuvre. Les châtellenies fonctionnaient sous la forme d’une rente financière ; elle devait rapporter à son propriétaire. Ce n’était pas en payant en nature qu’il allait faire fortune !
Je sais également que je casse un mythe pour les féministes convaincues qu’un tel droit est l’illustration parfaite d’une société phallocratique à laquelle il faut mettre un terme. Je me répète. Un tel droit n’a jamais existé.
Néanmoins, toute légende a une origine. Le droit de cuissage vient du droit beaucoup plus lucratif de formariage. Pour comprendre ce droit, il faut rappeler que l’Église avait interdit les mariages entre cousins jusqu’à la cinquième ou septième génération selon les régions. Le terme « cousin » était très élargi, car, même si aucun lien de sang n’existait en général entre son parrain (au sens chrétien) et sa filleule, ils leur étaient impossibles de s’unir. De fait, lorsque vous étiez un paysan et que vous habitiez bien sûr un petit village dans lequel tout le monde se connaissait, vous aviez peu de chance de trouver une épouse avec laquelle vous n’aviez aucun lien de cousinage... Les familles paysannes, car le mariage était bien entendu arrangé, allaient à la recherche d’une épouse dans un village voisin, toujours plus loin au fur et à mesure que les temps féodaux s’écoulaient.
À partir de ce moment-là, intervint le droit de formariage. Si l’affaire était entendue entre les familles, il leur fallait par la suite avertir leur seigneur respectif (pas directement bien entendu) de ce futur mariage. (1) Les seigneurs pouvaient leur refuser, mais ce n’était pas vraiment dans leur intérêt. (2) Le seigneur qui avait un paysan qui quittait sa terre, en général la femme, afin de rejoindre son mari, percevait une taxe pécuniaire, de quelques deniers (ce qui était déjà une somme importante à l’époque), en vertu du droit de formariage. Les coutumes étant locales, il arrivait également que le seigneur recevant le nouveau venu, percevait la même taxe. C’est tout de même beaucoup plus rentable, au sens de rentier, que de dépuceler les jeunes femmes, non ?
La distance toujours plus importante pour aller se chercher une épouse finit par tuer le droit de formariage qui tomba rapidement en désuétude au XIIIe siècle.
Voilà, désolé d’avoir cassé ce mythe si vous y croyiez vraiment et sincèrement, et joyeuse année 2022 !
Maxime Forriez.
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