La qualité de la formation universitaire
Date de publication : 12/10/2021
Une petite réflexion largement critiquable, donc n’hésitez à commenter ! Il s’agit d’un point sur tout ce que j’ai pu entendre, lire, voir, comprendre, donc une opinion très partiale et très personnelle sur le sujet.
La France est un pays étrange. Les entreprises ne reconnaissent que les formations des grandes écoles, et boudent les formations universitaires. On se demande tout de même pourquoi...
Le système universitaire reste méritocratique malgré toutes ses errances depuis les années 1980. Réussir en université est l’illustration d’une certaine forme de méritocratie à la française. Jusqu’à très récemment, n’importe qui pouvait s’inscrire en université sans aucune sélection. C’est par son travail, et uniquement par son travail, que l’étudiant parvient à décrocher son diplôme. Il le mérite...
Le système universitaire rend rapidement les étudiants autonomes. À la différence des prépas ou des écoles, l’effet de masse ne permet aucun suivi personnalisé avant la 3e année de licence, voire la 1ère année de master. Les étudiants doivent dès les premières semaines de cours se débrouiller tout seuls comme des grands. On les traite en adultes responsables (de leurs décisions). « Si vous n’allez pas en cours, OK, pas de problème, mais assumez vos résultats ! » C’est radical, mais très efficace pour gagner de l’autonomie et un certain regard critique que n’auront jamais les étudiants chouchoutés (en comparaison) des prépas et des écoles.
Cette autonomie va de pair avec l’apprentissage de la souplesse et de l’adaptabilité. Dans plusieurs disciplines, il n’existe pas d’harmonie dans la manière de comprendre, donc d’apprendre. Par exemple, en géographie, il existe autant de lecture du monde que d’enseignants. Les étudiants doivent sans cesse adapter leur discours à un enseignant spécifique, et ce en un temps record de trois mois (temps qu’ils ont entre le début d’un semestre et sa fin) ! En théorie, il est possible de défendre sa propre opinion en université, mais il est déconseillé de le faire dans ses travaux évalués avant le master.
Durant leurs trois ou cinq années d’études, les universitaires apprennent à devenir responsables de leurs choix, autonomes et souples avec des gens qu’ils peuvent détester. C’est bien tout ce que les entreprises dans les services recherchent, non ?
Plus spécifiquement pour les masters, les étudiants apprennent à se spécialiser rapidement sur un sujet de pointe qu’ils choisissent. Ils apprennent à exprimer clairement ce sujet via un mémoire de recherche. À la différence d’une thèse, son contenu est peu important. Cet exercice a surtout pour objectif d’apprendre à rédiger clairement un texte pointu. Il donne également l’occasion de lire des articles scientifiques, des livres, de visionner des documentaires, etc., c’est-à-dire de savoir rechercher rapidement une documentation fiable. Ce travail est normalement une collaboration entre un étudiant et un maître de mémoire (il est vrai qu’elle est souvent défaillante, mais cette situation n’est pas sans rappeler ce qui se passe souvent en entreprise).
Bref, au terme de vos cinq années à l’université, vous avez acquis plein de savoir-faire et de savoir-être, qui sont rarement mis en avant par les universitaires eux-mêmes, mais qui sont indispensables pour une entrée dans la vie active.
Pourquoi les boude-t-on alors ? Deux raisons. (1) Les universitaires manquent d’expériences techniques. Cela étant, ils ont appris à réfléchir et ils sont capables d’inventer une solution qui n’a pas été apprise par cœur, comme dans les écoles. Il faut être honnête. Les études de haut niveau suivies en université permettent à n’importe quel universitaire d’apprendre en un temps record des spécificités techniques, surtout si on débute en bas de l’échelle dans n’importe quelle entreprise. Pourquoi ne pas leur donner leur chance ? (2) Les universitaires vont forcément devenir professeur dans le primaire ou dans le secondaire. Cette deuxième idée reçue a la vie dure. Depuis la démocratisation de l’accès à l’université (années 1980), il y a beaucoup trop d’étudiants pour que tous deviennent enseignants. La plupart des concours d’accès sont extrêmement durs, et, contrairement aux prépas, les universitaires ne sont pas habitués aux classements. Après trois années de liberté totale, la contrainte posée par un cadre aussi rigoureux qu’un concours d’accès est difficilement supportable pour beaucoup d’étudiants, d’autant plus qu’il faut comprendre tout seul les codes de ce concours, et là ce n’est pas donné à tout le monde. Ajoutons le fait que les carrières d’enseignants sont de moins en moins attractives à cause des conditions de travail, et vous comprendrez que peu d’universitaires veulent devenir enseignants. La majorité des licenciés ou des masters souhaitent une autre orientation professionnelle dès leur entrée à l’université. Néanmoins, beaucoup d’entre eux tombent dans le piège de la liberté universitaire : tant de choix s’offrent à eux qu’ils ne savent que choisir, ce qui est très différent des choix accessibles après une spécialisation dans une école. Ainsi, ils se plantent, ils rebondissent, ils apprennent, mais ils finissent par trouver leur métier au sein duquel ils conservent leur curiosité intellectuelle, la qualité essentielle de leur formation initiale.
Maxime Forriez.
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