Dernière mise à jour : le 29 décembre 2015

Sujet d'étude. L'Algérie
Cours écrits et réalisés par Maxime Forriez (2015)

  1. Les prémices de la guerre d’indépendance (1946-1954)

  2.     En 1946, l’Algérie entre dans l’Union française, nouveau nom de l’empire colonial français. Les départements d’outre-mer et les territoires d’outre-mer sont créés à cette occasion.

        L’Algérie connaît trois grands problèmes :

    • des problèmes politiques. L’Algérie était constituée de trois départements rattachés au ministère de l’Intérieur. Elle était dirigée par un gouverneur général. Le territoire abritait deux catégories de citoyens : les Français ; les musulmans de « statut coranique ». Le statut de 1947 perpétua l’inégalité entre les deux catégories de citoyen. Il prévoyait l’élection d’une Assemblée algérienne de 120 membres aux prérogatives restreintes selon le principe du « double collège » (l’un Français, l’autre musulman). Les 8,5 millions de musulmans élisaient le même nombre de députés que les Européens. Les élections de 1948 furent notoirement truquées de manière à faire élire des représentants de l’administration dans le second collège (musulman) ;

    • des problèmes économiques. L’économie musulmane était archaïque, routinière et peu productive. Les Européens disposaient de capitaux et de machines dans le secteur agricole et dans le jeune secteur industriel en plein essor ;

    • des problèmes sociaux. Les 984 000 Européens en 1954 étaient en grande majorité nés en Algérie (80 % d’entre eux) et étaient composés de citadins, ouvriers ou représentants des classes moyennes (commerçants, artisans, cadres, employés, petits fonctionnaires) au niveau de vie médiocre, inférieur à celui de la métropole. Cette population était très attachée au sol où elle était née et qu’elle cultivait depuis parfois plusieurs générations. Dit autrement, les pieds-noirs refusaient toute réforme qui donnerait l’égalité aux musulmans. Par opposition, les 8,5 millions de musulmans connaissaient une véritable explosion démographique avec une croissance de 2,5 % par an, ce qui aggravait les difficultés sociales de la communauté. Seuls 2 millions d’entre eux avaient un niveau de vie proche de celui des Européens. Les autres souffraient de la pauvreté, d’une scolarisation précaire malgré les efforts prodiguées par l’administration française (18 % seulement étaient scolarisés) et des carences administratives.

  3. La première phase de la guerre (novembre 1954-été 1955)

  4.     Toussaint 1954. L’insurrection préparée par un groupe de jeunes militants animé par Ahmed Ben Bella, frappa davantage par la simultanéité des actions lancées sur l’ensemble du territoire algérien que par les résultats quasi-inexistants. Les chefs de la rébellion annoncèrent la création d’un Front de libération nationale (F.L.N.) et d’une Armée de libération nationale (A.L.N.), ainsi que leur détermination à obtenir de la France l’émancipation de leur pays. Ce mouvement rompait avec les partis nationalistes traditionnels. Néanmoins, il ne paraissait guère plus dangereux au départ que ceux qui se développèrent en Tunisie et au Maroc.

        La réaction du gouvernement français fut la suivante. Sur le terrain, il engagea l’armée (dont les effectifs passaient de 56 000 à 83 000 hommes en 1955) dans une vigoureuse action de « ratissage » qui réduit le mouvement insurrectionnel à une activité sporadique limitée aux zones montagneuses (Aurès et Kabylie). À Paris, Pierre Mendès et son ministre de l’Intérieur, François Mitterrand, puis Edgar Faure, multiplièrent les déclarations énergiques sur la nécessité de maintenir l’Algérie dans la mouvance française. Dans le même temps, on décida de pratiquer une politique de réformes. Le nouveau gouverneur général, Jacques Soustelle, voulut mener à bien l’intégration à la France des trois départements algériens par l’application loyale du statut de 1947, la modernisation économique et la mise en œuvre d’un vaste programme de scolarisation.

        20 et 21 août 1955 : émeutes dans le Constantinois. Pour prendre de vitesse le gouvernement français, le F.L.N. déclencha ce soulèvement destiné à s’affirmer auprès des musulmans, à creuser un fossé entre les deux populations et à intimider les partisans d’un dialogue avec les Français. L’attaque des quartiers européens et de fermes isolées autour de Constantine fit une centaine de morts.

        Les Européens réagirent par une « chasse à l’Arabe » qui fit officiellement 1 273 victimes (12 000 selon le F.L.N.) Désormais, les Français d’Algérie firent bloc contre les musulmans qui furent de plus en plus nombreux à se joindre au F.L.N., y compris parmi les modérés comme Fehrat Abbas.

        La logique terrorisme-répression-élargissement du mouvement insurrectionnel fut désormais en marche. Ainsi, elle étendit la guerre à l’ensemble du pays.

  5. L’enlisement dans la guerre (1956-1958)

  6.     6 février 1956. Guy Mollet se rendit à Alger pour y installer un nouveau gouverneur général réputé libéral, le général Catroux. Il fut conspué par les Européens qui forcèrent Guy Mollet à faire marche arrière et le remplaça par le socialiste Robert Lacoste. La politique du gouvernement Mollet redonna la priorité à l’action militaire. Elle fut approuvée par le Parlement (communistes compris) qui, en mars 1956, vota des pouvoirs spéciaux au gouvernement.

        Octobre 1956. Le gouvernement couvrit une initiative de l’armée qui détourna l’avion dans lequel avaient pris place plusieurs dirigeants du F.L.N. (dont Ben Bella), puis procéda à leur arrestation. A partir d’octobre 1956, résolu à remporter un succès militaire décisif, Paris s’engagea dans une guerre à outrance.

        1957. À Alger où sévit une guérilla urbaine, Robert Lacoste confia au général Massu la responsabilité de la sécurité. Pendant les 9 premiers mois de 1957, se déroula la « bataille d’Alger ». Fouilles, rafles, arrestations et emploi de la torture répondirent aux attentats aveugles du F.L.N. Malgré tout, l’armée ne put ni arrêter complètement le terrorisme, ni mettre fin aux harcèlements des bandes rebelles. La terreur que faisait régner le F.L.N. contre ceux qui collaborèrent avec les Français précipita les ralliements, volontaires ou forcés. Par ailleurs, les unités rebelles trouvèrent refuge au Maroc et en Tunisie, provoquant l’exaspération des militaires et l’escalade.

        Février 1958. En vertu du « droit de suite », l’aviation française bombarda le village tunisien de Sakiet Sidi Youssef qui fit 69 morts dont 21 enfants. Les conséquences furent nombreuses en métropole : détérioration de la situation financière, division et déchaînement de l’opinion publique, paralysie du pouvoir politique, montée de l’extrême droite, etc. La conséquence internationale fut que la position de la France était devenue intenable. Par exemple, les États-Unis et le Royaume-Uni soutinrent la France mollement, car il n’y avait pas de menaces communistes au Maghreb. Par ailleurs, ils estimaient également que la politique de la France pouvait inciter les pays arabes à se rapprocher du camp socialiste. Le bloc des pays arabes et asiatiques de l’O.N.U. attaqua vivement la France, ce qui l’obligea à s’abstenir de siéger à l’Assemblée générale de l’O.N.U. lors des débats sur la question algérienne.

        13 mai 1958. Effondrement de la IVe République.

  7. L’action du général de Gaulle (1958-1962)

  8.     De 1958 à 1962, le général de Gaulle achemina par étapes vers l’indépendance de l’Algérie.

        Au moment du 13 mai 1958, il ne semblait pas que de Gaulle avait un avis très arrêté sur la solution à apporter au conflit. En juin 1958, dans l’euphorie de la naissance tumultueuse de la Ve République, le général de Gaulle annonça qu’il n’y avait plus « qu’une seule catégorie d’habitants » en Algérie.

        Remarque. De Gaulle ne prononça qu’une seule fois l’expression « Algérie française » le 7 juin 1958 à Mostaganem.

        Septembre 1958. Charles de Gaulle offrit au F.L.N. la « paix des braves ». Ainsi, Le F.L.N. constitua un gouvernement provisoire (le G.P.R.A.), présidé par Fehrat Abbas. Pour Charles de Gaulle, il était essentiel que la France pût pratiquer une grande politique internationale. Dit autrement, il fallait arrêter cette guerre coloniale anachronique. Néanmoins, il existait une difficulté pour faire reconnaître cette évidence aux Français d’Algérie, à l’armée et à une partie de l’opinion métropolitaine. La marche vers l’indépendance de l’Algérie a été menée avec une extrême prudence.

        Septembre 1959. Après la « tournée des popotes », Charles de Gaulle reconnut le droit des Algériens à l’autodétermination avec trois solutions au choix : (1) la sécession, (2) l’intégration et (3) l’autonomie.

        Janvier 1960. Émeutes d’Alger (la « semaine des barricades »).

        Juin 1960. Charles de Gaulle évoqua « l’Algérie algérienne ».

        Début 1961. Charles de Gaulle annonça la création d’un « État algérien souverain ».

        Avril 1961. Putsch des généraux. Il fut un échec. Il n’a pas été suivi par l’armée.

        Mars 1962. Des pourparlers avec le F.L.N., engagés en 1961, aboutirent finalement en mars 1962 à la signature des accords d’Evian, ratifiés avec plus de 90 % de votes positifs au référendum d’avril 1962.

        5 juillet 1962. L’Algérie devint indépendante.

        Août 1962. Attentat du Petit-Clamart contre Charles de Gaulle organisé par l’O.A.S.